Mélusine, une Chabot?

Celles et ceux parmi qui, comme moi, sont des amateurs de contes populaires, ont certainement lu ou entendu, dans leur enfance, l’histoire de Mélusine1 ou l’une ses nombreuses variantes (parce que nos conteurs traditionnels empruntaient à gauche et à droite des bribes d’histoire pour enrichir leur propre répertoire). Or, il arrive qu’en faisant des recherches on déterre de petites perles qui, si elles ne font pas notre fortune, sont tout de même enrichissantes pour l’esprit. En voici une que j’ai dénichée en consultant un ouvrage ancien2 sur le Poitou avec l’espoir d’y trouver quelque information sur l’histoire de la région au temps de la jeunesse de Mathurin.

«C’était à peu près dans ce temps (1030) que vivait cette fameuse Mellusine, dont on a fait tant de contes.» P. 198

« D’après l’opinion la mieux établie, la femme extraordinaire qui a donné lieu à la fable de Merlusine, ou de Mellusine, si universellement répandue dans le Poitou, est Eustache Chabot, fille unique de Thibault Chabot, deuxième du nom, seigneur de Vouvant, de Rocheservière et de la Grève, qui a épousé Geoffroi de Lusignan, premier du nom, et qui est morte en 1229. En effet, d’après toutes les traditions et d’après le roman de Jean d’Arras lui-même, Merlusinea eut pour fils Geoffroy de Lusignan II, surnommé la Grand’Dent, qui brûla l’abbaye de Maillezais; or, on sait par des documents authentiques que la mère de ce Geoffroy, la Grand’Dent, fut Eustache Chabot; on en a conclu, avec raison, qu’elle a été la fée Merlusine tant célébrée dans la famille de Lusignan et de Parthenay. L’illustration de la maison à laquelle elle appartenait et de celle dans laquelle elle était entrée, son mérite extraordinaire, son savoir, ses grâces naturelles, sa prudence et peut-être aussi son goût pour l’architecture, lui donnèrent de la célébrité; et, dans ces siècles d’ignorance et de crédulité, on en fit une magicienne et une fée. […] Jean D’Arras3 qui vivait, au quatorzième siècle, ayant été chargé de composer un ouvrage pour amuser la sœur du roi, prit pour sujet l’illustre Poitevine et fit le roman de Mellusine, qui est parvenu jusqu’à nous. Il réunit sur son héroïne tout ce qu’il avait pu recueillir sur les seigneurs et les dames de la maison de Lusignan, et lui attribua ce qui appartenait à plusieurs membres de la même famille, sans aucun égard pour les circonstances de temps et de lieux; selon la mode du temps, il embellit son sujet de fables, d’allégories et de métaphores.»  P. 474

1.    Mélusine est une femme légendaire du Poitou, d'Alsace, de Lorraine, de Champagne, du Luxembourg et d'Allemagne souvent vue comme fée, et issue des contes populaires et chevaleresques du Moyen Âge. Très ancienne, elle est pour les mythologues la «mater lucina» romaine qui présidait aux naissances, ou une divinité celte, protectrice de la Font-de-Sé (fontaine de la soif). […]


2.    Histoire du Poitou par Antoine René Hyacinthe Thibaudeau. Nouvelle édition. Précédée d’une introduction par H. de Ste-Hermine avec notes. Robin & Ce., Libraires-éditeurs, Niort,1839.

3.    Jean d'Arras. Mélusine ou la noble histoire de Lusignan, roman du XIVe siècle. Nouvelle édition critique d'après le manuscrit de la bibliothèque de l'Arsenal avec les variantes de tous les manuscrits, traduction, présentation et notes par Jean-Jacques Vincensini, Paris, Librairie générale française, 2003 (Livre de Poche, Lettres gothiques, 4566)

---------------

Toutes les références sont tirées de Wikipédia aux rubriques: Mellusine, Merlusine ou Mélusine; Poitou; Jean d’Arras.



















Illustration d’époque du roman Mélusine de Jean d’Arras.













   

Édition ancienne publiée à Lyon. Source: BnF Gallica – Bibliothèque nationale de France


Illustrations de Mélusine. Source: Google images


Recherche : Marcel Chabot, 2017